La clémence de la décision prise par la Commission de discipline de la FFF à l'égard de Fabien Barthez ne restera donc pas sans suite. Face à l'avalanche de protestations suscitée par la sanction, au premier rang desquelles l'incompréhension manifestée par le ministre Jean-François Lamour, le bureau de la Fédération a choisi de faire marche arrière et de faire appel de cette décision constatant notamment "le décalage entre cette décision et les dispositions du règlement." Samedi, à Nantes, l'épée de Damoclès pèsera de nouveau sur Barthez...
Jean-Pierre Escalettes pouvait-il faire autrement...
L'intérêt supérieur du football français n'autorise pas tout. Et surtout pas n'importe quoi... En adoptant jeudi soir le principe d'une clémence hors de propos à l'égard de Fabien Barthez pour ne pas priver de son ange gardien une équipe de France en grosses difficultés sur la route du Mondial 2006, la Commission de discipline de la FFF a joué hors jeu. Les six mois de suspension dont trois avec sursis infligés au portier de l'Olympique de Marseille, qui ne manquera finalement que cinq matches, sont frappés du sceau de l'hypocrisie la plus totale.
Crachat ou pas crachat, l'attitude de Fabien Barthez constituait dans le contexte actuel un exemple déplorable pour un football amateur que l'on sait gangrené par la violence et l'irrespect permanent pratiqué à l'égard de l'homme en noir. Un comportement indigne d'un joueur aux états de service peut-être impeccables – seulement deux cartons jaunes en carrière – mais dont l'exposition et le caractère exemplaire soumettent à certaines responsabilités fondamentales.
Lamour: "La nécessité de faire respecter l'arbitre..."
Parce qu'il fallait sauver le soldat Barthez, « victime » d'un moment d'égarement à Casablanca, Jean Mazzella, le président de la Commission de discipline et les dix-sept sages qui siégeaient jeudi face au Marseillais en ont oublié le principal et le respect pure et simple du règlement. Une légèreté qui n'a pas manqué vendredi tout au long de la journée de susciter les réactions plus ou moins agacées, dubitatives et même carrément outrées, à l'image d'un Bernard Saules, président choqué de l'UNAF, l'un des deux syndicats des arbitres français.
Une avalanche de protestations dont la plus marquante et finalement l'une des plus rapides aura été celle de Jean-François Lamour, ministre des Sports monté au créneau pour regretter tant de largesse dans un domaine qui ne requiert pourtant que rigueur, et surtout bien décidé à infléchir cette prise de position de la FFF: "Je suis convaincu que la Fédération et son nouveau président vont trouver des solutions adaptées et vont faire face, a immédiatement souligné le double champion olympique. M. Escalettes est convaincu comme moi, de la nécessité de faire respecter l'arbitre. C'est un travail de fonds. On ne peut pas demander à l'Etat des moyens supplémentaires, des réglementations et des lois supplémentaires pour éviter toutes ces formes d'incivilité, sans que chacun soit responsable de sa partie d'action." A la lecture d'une telle réaction, on imagine Jean-Pierre Escalettes, le président de la Fédération, confronté à son premier dossier chaud, plutôt mal à l'aise devant la tournure prise par les évènements.
Un appel du pied à peine déguisé du ministre face auquel l'ancien homme fort du football amateur, toujours prompt à dénoncer les dérives du monde professionnel à l'époque de ses anciennes fonctions, ne pouvait décemment pas demeurer sans réaction. Aux alentours de 18 heures, soit moins de huit heures après la révélation de la sanction infligée à Barthez, la FFF, par le biais d'un communiqué, faisait machine arrière et désavouer sa Commission de discipline en annonçant qu'elle avait "décidé d'interjeter immédiatement appel" de la sanction "auprès de la commission supérieure d'appel de la FFF." Et justifier surtout ce revirement par "le décalage constaté entre les dispositions du chapitre 1.5 du barème des sanctions (...) qui prévoit, en cas de « bousculade volontaire, tentative de coup(s), crachat(s) à l'encontre d'un officiel », une sanction de six mois de suspension ferme incompressible et susceptible d'être aggravée - selon l'appréciation des faits - d'une peine pouvant être assortie de sursis."
En clair, Fabien Barthez semblait bel et bien mériter six mois de suspension fermes. Une sanction qui le place donc à nouveau sous la menace d'une absence portée non plus à cinq mais à trente matches (*), son retour ne devant intervenir dès lors qu'en... novembre 2005. Le dossier Barthez reste ouvert...
(*) En cas de suspension de six mois fermes, Barthez manquerait la fin des éliminatoires de la Coupe du monde 2006 avec les Bleus mais aussi en plus des derniers matches de l'actuelle saison de Ligue 1 avec l'OM, quasiment la moitié de l'exercice 2005-2006.